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concerto à quatre mains
10 juin 2020

Aventure ou mésaventure

Tout au long de sa vie, Vladimir avait aimé. Il avait aimé séduire. Il avait aimé aimer.                          
De jour en jour, plus exactement jour après jour, Vladimir avait aimé aiguiser son oreille.
Il l'avait éduquée, entraînée, sans relâche.
Il n'avait pas l'oreille absolue, oh non, mais il avait fini par avoir l'ouïe terriblement fine.
A un point tel que, souvent, il en était assourdi.

Sans jamais être abasourdi. Ni par ses semblables ni par les mensonges.
Et encore moins par la vérité.
La vérité ! On dit qu'elle n'est pas bonne à dire. 

C'est pourquoi les hommes politiques la disent si rarement.
Mais « Rien n'est vrai que le cœur... »
Serait-ce donc que les politiques n'ont point de cœur.
Ils ont pourtant, parfois, bien du cœur à l'ouvrage ...

Vladimir aurait aimé, j'en suis certain, faire pour vous un discours sur la déontologie élastique de certains hommes politiques et encore moins sur celle de certains journalistes qui ont oublié que la liberté d'expression n'est pas synonyme de comptes-rendus partisans ou subtilement incomplets.

Il aurait voulu vous parler de retraite, non celle de Russie, ni la retraite de l'ermite,
encore que Goethe n'avait-il pas raison : « Le talent se développe dans la retraite; le caractère se forme dans le tumulte du monde » ?
Mais n'est-il pas plus juste, plus « responsable » de faire une honnête retraite que de livrer un combat incertain qui bat en brèche les intérêts fondamentaux de l'individu ?
Et je craignais fort que Vladimir se laissât aller à reculer devant cette absurde adversité.

Qui est-il ?

Il avait si souvent dit que la vie est un théâtre, un théâtre où chacun a un rôle à jouer, voire plusieurs rôles.
La vie est un théâtre...comme il a raison, mais peu de ses semblables le comprennent.
Comme un acteur découvre, apprend, digère son texte, l'individu doit apprendre à tenir le rôle... qu'il veut jouer.
C'est aussi un apprentissage, et Vladimir pensait pouvoir dispenser cet apprentissage plus qu'un enseignement.
Même s'il pensait aussi « enseigner, c'est mettre en scène, et mettre en scène, c'est encore enseigner ».

«Ne parle pas, forme les acteurs», conseillait Max Reinhardt.

Il en va de la vie comme de la musique, de la danse, et du théâtre et de la littérature :
« cent fois sur le métier... ».

Seule la durée peut offrir une chance de réussite. Avec les risques inhérents à une telle imprégnation.
Le secret de l'acteur ne peut passer que de main en main, disait Stanislavski, « l'âme se doit de travailler ».
Je savais que le plus grand espoir de Vladimir avait été de s'imprégner de la certitude de sa vision.
Sa mère l'aimait, l'admirait, l'adorait, l'adulait, rêvait pour lui de tout et rien, comme toutes les mamans du monde, probablement !
L'amour que Vladimir portait à « La Femme » lui venait de sa mère. Et de son père, certes, grand amoureux et incorrigible séducteur.
Mais sa mère lui avait appris sans le lui apprendre, elle lui avait transmis comme on peut transmettre indiciblement une hérédité ou un gène, elle lui avait donc appris que la femme était toujours forte dans sa fragilité.
Plus tard, il avait découvert qu'elle était immanquablement fragile, et plus encore lorsqu'elle était forte.
Vladimir cultivait ses atavismes avec la délectation de celui qui sait d'où il vient sans connaître vraiment la route qui l'avait conduit là. Là où il était.

Qui est-il encore?
Là où il était, encore jeune homme, il se sentait déjà « vieux », à force d'avoir usé ses culottes ici et là.
Puis, devenu vraiment adulte, il avait retrouvé son âme d'enfant, s'émerveillant de la richesse de la vie... pour peu qu'on la trouvât riche.
Tout jeune adolescent, Vladimir avait découvert des mots qui allaient influencer toute sa vie.

D'autres mots, plus tard, lui avaient révélé quelques évidences mais il se rappelait comme si c'était hier combien il avait ressenti comme éclatante vérité : « Rien n'est vrai que le beau, rien n'est beau que le vrai »
Et rien n'est aussi vrai et beau que le cœur.

Mais le corps a ses raisons que le cœur ne connaît pas toujours !

Faut-il glorifier les cyniques, en mémoire d'Antisthène, disciple fidèle de Socrate ?
Ils ont leurs continuateurs modernes, les pires : les hommes politiques qui conjuguent avec maestria le cynisme à tous les temps !
Mais lorsque le cynique secoue l'opinion, brave les convenances, raille les croutes superficielles des morales, il utilise son intelligence avec la lucidité d'une lentille photographique pour secouer un monde endormi ou un entourage en pleine léthargie.
Ce cynisme, quand il s'exprime dans l'humour ou la raillerie, peut aussi révéler un profond découragement.

Vladimir se gardait de toutes ses forces de cet écueil et cultivait « sursum corda ».
La bienséance étant bien plus une question de forme que de fond,
il était convaincu qu'il était nécessaire et même vital de « se secouer »,
avec entrain et cynisme positif, sans complaisance aucune.

Dans le cercle de ses amitiés, ce sont les femmes qui dominent. La majorité de ses lettres leur sont adressées.
C'est seulement avec elles, devant elles qu'il peut se mettre à nu.
Enfin autant que sa pudeur le lui permet... et elle est grande.

Mais jamais tout à fait. Vladimir a toujours cherché et cherche toujours une femme multiple et non de nombreuses femmes !
Il en connût assez... Une femme  qui ressemblât à la perfection à « la » Muse.
Non pas à la muse de Baudelaire, encore que Vladimir reconnaisse volontiers à la femme le droit d'être intéressée.
La muse à la façon d'Olga pour Strauss ou Gala pour Dali !
Mais aussi et dans le même élan, Érato, Calliope et Thalie.

Vladimir s'interroge toujours et déplore qu'Éros fût un Dieu masculin ...      
Ce n'est pas seulement le désir d'aventures, la sensualité, l'érotisme qui provoquent cette quête renouvelée, mais aussi un besoin passionné de repos, en étant bien conscient que le désir amoureux est en opposition avec ce « repos », repos de l'âme et de l'esprit, quiétude du corps et des sens .
Vladimir n'a jamais été un Don Juan, un Casanova, un érotomane et ses vœux vont à la femme au sens le plus essentiel : la femme, face cachée de l'homme.
Je crois pouvoir vous dire, chère lectrice, que Vladimir place le désir avant le plaisir.
Le désir qui est déjà une forme de plaisir et pas seulement cérébral.
Ce désir envahit tout son être...

Je sais, parce que je le connais comme un autre moi-même, que lorsqu'il est en état de désir pour une femme,  son mental s'anime à la folie, exacerbe son érotisme, et qu'il est même parfois étonné de la réaction de son corps.
Il m'a confié, très récemment, que s'étant trouvé terriblement attiré par une femme rencontrée par hasard, il avait ressenti des manifestations inhabituelles chez lui, pour ne pas dire nouvelles.
Imaginez un peu, cet homme, grand amateur de la femme et consommateur expérimenté, ressentant des picotements dans la verge,
effaré, il me l'a confié en confidences, effaré de découvrir que cet état de désir intense l’avait pénétré jusqu’au tréfonds !                                                      Vladimir aurait pu être un autodidacte sans-culotte. Il se souvient quand il était bébé que sa mère le laissait souvent sans culotte.
Le fait d'avoir été les fesses à l'air lorsqu'il était en âge de ne point heurter la bienséance ne favorisant pourtant aucune prédilection à quelque esprit révolutionnaire.

Parfois, une relation se trouve interrompue pour des malentendus divers et variés et la susceptibilité des uns et la sensibilité des autres font qu'un grand vide se créée autour de nous.
Place alors, si l'on n'y prend garde, à la rancune et à l'amertume et le temps passe et n'en finit pas de passer...
Tout passe, dit-on, sauf le temps qu'on n'a pas tué.

Il m'a dit qu'il était parti se rafraîchir le corps et l'âme .
Mais il m’avait confié un souvenir qui revenait souvent le tarabuster.
Vladimir avait aimé le regard d’une femme posé sur lui
Il rêvait de la serrer très fort dans ses bras.
Elle aimait quand il lui disait qu'elle était belle Il savait qu'elle aimerait qu'il lui dise tous ces mots tendres.                           
Les mêmes mots dont il aimait caresser ses désirs.                                         
Il pensait qu'elle aimerait qu'il fasse son jaloux, il m'avait dit en avoir eu l'intuition.
Tout comme il savait qu'elle-même avait bien de la peine à ne pas montrer qu'elle était jalouse.
Vladimir aimait quand ils feraient des folies sans être fous
Il brûlait de toutes ces petites attentions qu'il aurait eues pour elle
Il pensait la regarder dormir comme un bébé Il aurait tant aimé sentir qu'elle avait besoin de lui demander conseil

Elle aimait, m'a-t-il dit, sa façon de savoir l'écouter Et il n'aimait pas du tout qu'elle ne l'entende pas.
Il aimait leur histoire, les premiers chapitres de cette histoire.
Vladimir est toujours ému par les frissons qui pourraient sur sa peau jusqu'à ses lèvres.
Car celles-ci ne peuvent mentir alors que les autres cèlent souvent une cruelle vérité.

Vladimir, voyez-vous, mon plus fidèle ami, m'a fait l'amitié de me faire quelques confidences intimes,
me disant ce qu'il avait ressenti quand cette femme lui avait montré une attirance très...
je n'en dirai pas plus, je ne veux pas trahir sa confiance.

Voilà, je vous ai parlé de Vladimir, ne lui dîtes surtout pas tout ce que je vous ai révélé sur lui...

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Commentaires
B
Je me sens tellement proche de ces pensées sur la solitude, merci de les avoir exprimées
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L
c'est étonnant, une telle amitié
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A
J'ai adoré, mais ne le dites surtout pas à Vladimir....Bonsoir !
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I
Je suis un peu perdue, est-ce une suite ou un texte à part? Pourquoi cet ami vient il parler de Vladimir?
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H
Quelle chance vous avez d'avoir un tel ami si cultivé et qui semble connaître le théâtre, mon rêve
Répondre
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